Exposition « Marfa, Texas » Galerie Sit Down Paris

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Annonce de l'exposition écrite à la main par Christian Roux sur la vitrine de la galerie.
Annonce de l’exposition écrite à la main par Christian Roux sur la vitrine de la galerie.

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Exposée pour la première fois, la série « Marfa,Texas »  a été réalisée en février et juin 2013. L’exposition à la galerie Sit Down à Paris se tient du 12 avril au 11 juin 2016, au 4 rue Sainte Anastase 75003.

Ces clichés minimalistes en noir et blanc, aux cadrages précis, décrivent une réalité

architecturale rigoureuse où les paysages désertés dégagent toute leur poésie.

A la manière d’un inventaire austère, François Delebecque avec ses images simples et

pures joue à la fois sur l’esthétisme et la photographie documentaire. Il révèle à travers ces

photos silencieuses cette incroyable ville musée à ciel ouvert.

Un silence rompu par la vidéo qui sera projetée à l’occasion de l’exposition où le fracas des interminables trains de marchandises qui traversent dix à douze fois par jour la ville d’est en ouest, brise la tranquillité de cette minuscule cité aux

allures de décor de cinéma.

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Natacha Wolinski a écrit un texte (magnifique) sur ce travail:

Les trompe-l’œil de Marfa

Certains lieux sont plus habités que d’autres. Marfa compte 2000 âmes et un fantôme. Le fantôme se nomme Donald Judd et sa présence tutélaire sculpte les pleins et les vides de la ville. Donald Judd était adepte des formes simples et répétitives. Il parlait la langue cursive de la géométrie. Située à trois heures de route d’El Paso et de tout signe de civilisation, Marfa a constitué pendant trente ans sa retraite et son laboratoire. Il y a forgé son grand œuvre. Cent boîtes en aluminium strictement alignées dans d’anciens baraquements de l’armée américaine. Quinze blocs de béton strictement dispersés sous l’aplat des cieux. Les boîtes aux surfaces réfléchissantes renvoient des clartés dans les profondeurs des baraquements. Les blocs opposent leur opacité à la radiance des jours. La matérialité des œuvres dialogue avec la densité de l’espace et du vide.

 

Posée dans le désert de Chihuahua comme un mirage à fleur de roche et de poussière, Marfa est devenue, grâce à Donald Judd, une place forte de l’art minimaliste. Depuis la disparition de l’artiste en 1994, cette bourgade reculée du Texas suscite la fascination et se peuple de silhouettes venues des quatre coins du monde. En 2013, François Delebecque a compté parmi les nombreux pèlerins qui prennent la route de l’ouest américain pour s’arrimer au périmètre étroit de cette ville blanche et faussement assoupie. En promenant son regard dans Marfa, il a trouvé partout des réminiscences de Donald Judd, comme si, sous l’effet de la chaleur, les formes rigides qui obsédaient l’artiste se réverbéraient dans chaque angle mort et chaque édifice. Son objectif a buté sur des façades droites et compactes, des pans coupés, des ouvertures grillagées, des cubes et des rectangles ancrés dans un espace où la perspective s’absente, remplacée par un affrontement brutal entre le matériel et l’immatériel, le permanent et l’impermanent, l’unique et le multiple.

 

Sous l’oeil de François Delebecque, l’étroite Marfa se métamorphose en un site monumental. Les architectures art déco et les demeures hispanisantes se dressent comme des temples. Les ombres se croisent à angles droits. Les murs fonctionnent comme des surfaces écran sur lesquels rien ne vient se réfléchir. Sans doute parce que Marfa est un trompe-l’œil, un jeu de pistes dont il faut dénouer les chausse-trappes. Le ballroom local n’est pas une salle de bal mais un centre d’art. La boutique Prada ne vend pas de sacs ni de chaussures car c’est une installation. A rebours, la Pizza foundation ne présente pas d’œuvre puisque c’est une simple pizzeria qui se hausse du col. La ville est un poème mathématique rythmé par l’allitération des fenêtres et la scansion des wagons de chemin de fer qui la traversent douze fois par jour. Sous l’aplomb du soleil qui accuse les contrastes, François Delebecque a fait de Marfa une ville ouverte sur nowhere et close sur sa propre mythologie.

 

Natacha Wolinski